À bord du wagon-bar aux rencontres d’Arles

Je me suis procurée il y a quelques semaines le livre “Wagon-bar” publié aux éditions Textuel avant de planifier mon week-end aux rencontres d’Arles. J’ai tout de suite été attirée par ces lettres rose jambon nitrite et cette couverture crème qui rappelle les bouquins des années 70. Étrangement, c’est la deuxième fois que j’achète un livre d’exposition avant de voir l’exposition. Donc je me demandais bien comment ce sujet allait être présenté aux rencontres d’Arles sachant que l’art photographique n’est ici pas central. Pas de doute, c’est un petit voyage qui n’ouvre pas l’appétit et qui nous mène plutôt avec joie vers une modernité approximative ou déchue (ce qu’on appelle la kitchmania).

La ripaille mène grand train

L’histoire du repas ferroviaire n’aurait pas pu s’écrire sans la table bourgeoise présente dans les voitures-restaurants des Grands Express. À l’instar du wagon-bar popularisé dans les années 70, tout a commencé sur une nappe impeccablement blanche lors de voyages dans des trains de luxe. Pendant toute la première moitié du XXème siècle, il n’y avait pas cette notion de moment casse-croûte sur rails, mais plutôt une volonté de vivre une expérience proche des palaces, et déguster choucroute ou plateaux de fruits de mer. Et cela a quand même l’avantage de nous fasciner, comme une pratique tristement tombée dans l’oubli, en oubliant qu’elle était uniquement destinée aux personnes aisées. 

Snack de première classe 

Les images de l’exposition nous montre cet aspect gargantuesque des repas en train, avec les menus fastueux, la technicité mise en place pour garder la nourriture, les images des cuisines, et l’évolution de la vaisselle à bord. Et puis dans les années 60, le transport en train se voit menacé par l’avion, et particulièrement les voyages dans les nuages en classe affaires. Mais la voiture-restaurant n’a rien à envier du service aérien aux petits-oignons, c’est ce que tentent de présenter quelques films et affiches publicitaires à coup de grands classiques de la gastronomie française et d’une clientèle en robe Courrèges.  

L’entrée du minibar

À partir des années 70, on est dans l’âge d’or de l’innovation pour la SNCF. C’est ce qui rend selon moi toute cette exposition passionnante : voir à quel point la restauration en train fût un terrain de jeu pour publicitaires et designers. Et c’est là que débarque le club sandwich, un format vu à l'époque comme fleuron de l’innovation à la fois dans sa présentation et dans les goûts présentés. Vous aviez capté que le sandwich découpé de cette manière représentait des rails de chemin de fer (sur l’hypoténuse du triangle) ? Votre pause autoroute n’aura plus jamais la même saveur après cette info.

  Bref, la restauration dans les trains a été l’objet d’une créativité foisonnante pendant plus d’un siècle, en s’adaptant à la technologie de ces moyens de transport en plus des habitudes des voyageurs. 

Aujourd’hui, on se rend en voiture 4 pour acheter une canette de soda ou un paquet de chips, enfin à vrai dire je ne sais pas ce qu’on y fait concrètement vu que je n’y mets jamais les pieds et qu’elle est fermée les ¾ du temps. Mais avec l’engouement ces dernières années pour le transport sur voies ferrées et la réouverture des trains de nuit, est-ce que l’avenir du wagon-bar ne se trouvera pas dans le couchette & breakfast ?

“Wagon-bar”, exposition à voir aux rencontres d’Arles jusqu’au 29 septembre 2024 à l’espace Croisière.